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Le Maroc en marche : placement du Capital-Investissement au cœur de sa croissance

Published On: juin 2024
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« Pour dynamiser la croissance du secteur du Capital-Investissement, il est essentiel de réaliser un changement dans la culture du financement dans notre pays, impliquant tous les acteurs : pouvoirs publics, opérateurs financiers et entreprises […] il est démontré que l’écart de croissance et de productivité entre les États-Unis d’Amérique et l’Europe provient de la prédominance de la finance désintermédiée centrée sur les marchés financiers et le Capital-Investissement. »

Extrait de l’interview de LesEco.ma avec le président honoraire de l’AMIC.

Introduction

Depuis mars 2020, le Maroc a démontré une grande résilience à une série de chocs, respectivement Covid-19 en 2020, les effets du conflit entre l’Ukraine et la Russie en plus des répercussions économiques de la crise en 2022, enfin le séisme d’Al Haouz en 2023, par la mise en place de divers plans d’urgence et des politiques de développement.

Dans le cadre du Nouveau Modèle de Développement (NMD), le Royaume prévoit mettre en œuvre plusieurs réformes ambitieuses afin de renforcer cette résilience notamment par la promotion du capital humain et l’incitation de l’investissement privé. Ces initiatives s’inscrivent dans une volonté de booster la croissance marocaine dans un contexte complexe nécessitant la contribution active et étroite de tous les acteurs économiques, notamment les opérateurs du secteur financier.

Concrètement, la Banque Centrale travaille à maîtriser l’inflation pour soutenir la croissance, tandis que les banques commerciales et participatives continuent de jouer un rôle important en fournissant des financements aux particuliers et aux entreprises,

que ce soit pour répondre à des besoins de consommation ou pour soutenir des projets de grande envergure. Les compagnies d’assurance cherchent également à élaborer des solutions adaptées pour faire face aux nouveaux risques découlant des incertitudes récentes et futures. La bourse de Casablanca quant à elle demeure une source de financement alternative considérable pour les entreprises désireuses d’accéder aux capitaux nécessaires à leur croissance, surtout dans des conditions économiques volatiles.

Dans ce paysage dynamique, il convient également de souligner le rôle des sociétés de Capital-Investissement qui offrent non seulement un soutien financier mais aussi un accompagnement stratégique adapté aux entreprises en croissance les aidant à traverser des périodes difficiles sur un horizon d’investissement déterminé. Comme son nom en anglais l’indique « Private Equity », le Capital-Investissement est privé parce qu’il lève des fonds auprès d’investisseurs institutionnels et accrédités, d’une manière telle qu’il évite d’avoir à faire une offre publique d’actions sur une bourse de valeurs.

Sur le plan historique, selon Wall Street Journal, le concept « Private Equity » n’est pas nouveau, du moins ses méthodes telles que le Capital-Risque (Venture Capital), le capital de croissance (Growth Capital) et les rachats par endettement (Leveraged Buyout), existent depuis longtemps. Au fil du temps, ce modèle d’investissement a évolué, passant de simples investissements de familles riches à l’implication de grandes banques qui acquièrent des participations majoritaires dans des entreprises en difficulté, comme l’acquisition de Carnegie Steel par JP Morgan & Company en 1901 pour former la plus grande entreprise du monde « United States Steel ».

À l’échelle mondiale, au cours du premier semestre de 2022, le secteur a maintenu son élan de croissance, après avoir enregistré une vague d’opérations record s’élevant à 654 milliards de dollars en 2021, ce qui confirme une tendance à la hausse remarquable depuis le début du 21ème siècle. Parallèlement, au Maroc, le secteur du Capital-Investissement a marqué un nouveau record d’investissement en 2021, atteignant 1 155 MMDH, après un précédent record de 1 198 MMDH établi en 2018. D’après l’Association Marocaine des Investisseurs en Capital (AMIC), le Royaume compte 33 sociétés de gestion opérant dans le domaine du Capital-Investissement jusqu’à la fin de 2022, comprenant des banques et sociétés de gestion d’actifs, des caisses de retraites et des compagnies d’assurance, ce qui témoigne d’une présence significative et diversifiée d’acteurs dans le domaine et souligne ainsi l’importance croissante de ce secteur dans l’économie nationale. Dans la continuité de cet objectif, l’AMIC a organisé en mai 2023 sa 10ème conférence sur le Capital-Investissement visant à explorer les opportunités de développement du Capital-Investissement dans le Royaume, tout en favorisant l’investissement dans divers secteurs de l’économie marocaine.

En réponse à cette dynamique économique importante et résistante du Maroc et sa volonté affirmée de dynamiser le secteur du Capital-Investissement, le Royaume devra capitaliser sur l’expérience internationale pour placer efficacement le Capital-Investissement au cœur de sa croissance économique, en tenant compte de son histoire et des défis spécifiques rencontrés dans ce parcours ambitieux.

Alimenter la croissance de l’économie marocaine par le Capital-Investissement

Les dynamiques de croissance de l’économie marocaine :

En vue de moderniser son appareil productif et d’améliorer ses performances et sa résilience, le Maroc a établi une stratégie intégrée pour transformer son économie par le biais du développement de stratégies sectorielles. Cette vision s’inscrit dans une logique de consolider les leviers spécifiques à chaque secteur, tels que les investissements dans la recherche et développement, les politiques fiscales, les ressources humaines, les partenariats public-privé et l’accès aux financements, afin de stimuler étroitement tous les moteurs de la croissance économique.

Suite à la conjoncture internationale marquée par une persistance de l’inflation et une volatilité du secteur financier et grâce aux efforts de l’État marocain dans le cadre des politiques sectorielles et commerciales, les indicateurs quantitatifs et qualitatifs ont enregistré une amélioration significative. Au cours des huit premiers mois de 2023, la balance commerciale a connu un allègement de son déficit de 9,4%, s’établissant ainsi à 192 MMDH, soutenue par la légère augmentation des exportations de 0,2% par rapport à août 2022, une croissance qui a été particulièrement observée dans les secteurs de l’automobile, de l’électronique, de l’électricité, du textile et du cuir et par la baisse de 3,9% des importations par rapport à la même période.

En ce qui concerne les flux nets des Investissements Directs Étrangers (IDE), l’Office des changes marocain a annoncé un total de 21,7 MMDH en 2022 contre 20,7 MMDH en 2021, soit une augmentation de 6,8%. Ces investissements étrangers ont principalement été dirigés vers le secteur de l’industrie (37%) et de l’immobilier (20%), suivis par les secteurs du transport et du tourisme avec des parts respectives de 7% et 5%. Toutefois, les constats de l’année 2023 affichent une valeur de 10,15 MMDH, ce qui démontre une diminution remarquable de 53,3%. Ainsi, la baisse de 17,8% des recettes et l’augmentation de 25,6% des dépenses, soulèvent des incertitudes quant à l’évolution des IDE, un facteur fondamental pour la croissance de l’économie marocaine, dans les années prochaines.

Suite à une légère augmentation de la valeur de l’euro, pour atteindre en moyenne 1,08$ entre janvier et septembre 2023, le dirham s’est déprécié au cours de la même période, à la fois face à l’euro (10,97dh/€, soit +3,7%) et au dollar (10,12dh/$, soit +2,2%).

Cette dépréciation du dirham pourrait avoir des effets positifs sur l’économie marocaine, malgré les préoccupations quant à son impact sur le pouvoir d’achat des ménages. D’une part, elle pourrait renforcer la compétitivité des exportations marocaines sur les marchés internationaux, stimulant ainsi les ventes à l’étranger. D’autre part, cette dépréciation pourrait également entrainer une hausse des coûts des importations pour les entreprises et les consommateurs marocains, incitant ainsi à privilégier la production locale. Cela devrait contribuer à l’atténuation du déficit commercial marocain ainsi qu’à la réduction de la dépendance aux produits étrangers.

Il est également essentiel de souligner l’évolution du taux d’inflation au Maroc en 2023, caractérisée par une tendance à la baisse depuis février. Durant cette période, le taux d’inflation est passé de 10,1% en février à 5% en août. Cette tendance reste maitrisée grâce aux actions entreprises et engagées par les pouvoirs publics pour réduire l’impact, surtout sur la capacité économique des ménages.

L’inflation sous-jacente, quant à elle, suit également une trajectoire descendante pour s’établir à 4,9% en août 2023 après avoir atteint +8,1% en mars de la même année. Cela implique que la hausse des prix à la consommation est maitrisée même en excluant les produits à prix volatiles et les produits réglementés. Une réduction de la pression inflationniste est attendue à long-terme favorisant ainsi la confiance des consommateurs et des entreprises dans la dynamique de l’économie nationale en général et dans les politiques monétaires mises en place par les autorités publiques.

En 2023, la croissance économique est prévue à 3,2%, après une croissance modeste de 1,3% en 2022. Cette hausse est principalement due à un accroissement de la demande intérieure, à la reprise des activités agricoles, qui ont enregistré une croissance de 5,7% au troisième trimestre de 2023, et de l’activité halieutique, qui a connu une croissance de 80,7% au même trimestre. Il est à noter que cette tendance intervient dans un contexte où l’inflation est sous contrôle et où les besoins de financement de l’économie nationale sont en hausse.

Dans cette perspective, le Maroc s’engage à accélérer la transformation structurelle des secteurs porteurs de croissance, notamment :
– L’agriculture, par la mise en œuvre de la stratégie « Génération Green » 2020-2030, visant à améliorer le taux de valorisation des produits agricoles marocains à près de 70% d’ici 2030

– L’industrie, avec le lancement effectif de la nouvelle Charte Nationale de l’Investissement en 2023 et la création du Fonds Mohammed VI pour l’Investissement en vue de renforcer l’offre de financement en fonds propres en faveur des sociétés marocaines, ainsi que par le développement des industries de pointe, en particulier les secteurs du transport et de la mobilité.

– Le tourisme, par l’établissement d’une feuille de route de relance du secteur à horizon 2026, visant à renforcer la compétitivité de l’offre touristique marocaine tout en créant 200 000 emplois directs et indirects, à réformer la gouvernance et à débloquer les fonds pour atteindre 17,5 millions de touristes en vue de générer 120 milliards de dirhams de recettes de voyage.

Concernant l’année 2024, les perspectives pour l’économie marocaine semblent indiquer une croissance modérée, selon les analyses de la CFG Bank, possiblement alignée sur celle de 2023, qui était de 3,2%. Les prévisions du Haut-Commissariat au Plan (HCP) suggèrent une croissance de +2,9% pour l’économie nationale dès le premier trimestre de 2024, avec plusieurs constats significatifs : une contraction de l’activité agricole attribuée aux températures excessives enregistrées pendant le trimestre. En revanche, le secteur de l’industrie manufacturière aurait enregistré une progression notable de 6,8% au cours du premier trimestre de 2024. De même, une croissance qualifiée de plus robuste a été observée dans le secteur de la construction, avec une augmentation de 3,7%, contre une baisse de 3,4% enregistrée au T1 de 2023. Enfin, les branches tertiaires auraient également enregistré une croissance soutenue, avec une augmentation de 3,1% au premier trimestre de 2024, notamment grâce à la résilience des services aux entreprises.

D’après des économistes, la stabilité macroéconomique du Maroc permet d’envisager un taux de croissance dépassant les 5%. Cette prévision est soutenue par les nombreuses opportunités dont bénéficie le Maroc, le positionnant sur une voie prometteuse de croissance économique et de développement durable. L’organisation de la Coupe du Monde 2030 va renforcer l’image du pays en tant que destination touristique, stimulant ainsi le secteur du tourisme et ses industries associées telles que l’hôtellerie, la restauration, le divertissement et le transport. De plus, le développement des infrastructures portuaires et aéroportuaires à travers des projets ambitieux à l’horizon 2030 et 2045 permettra de moderniser et d’adapter les capacités logistiques du pays à la croissance du commerce et du trafic aérien. Par ailleurs, les réformes visant à améliorer le climat des affaires, notamment la réforme du régime de change pour une plus grande flexibilité, ainsi que l’investissement continu dans la mise à niveau des technopoles du Royaume, contribueront à stimuler l’investissement et l’innovation. De plus, la poursuite de la transition énergétique, avec un accent particulier sur le déploiement des énergies renouvelables et la promotion de l’hydrogène vert, offrira de nouvelles opportunités dans le domaine de l’énergie durable.

Cependant, la croissance économique du Maroc est également confrontée à plusieurs défis qui entravent son développement à long-terme. L’investissement privé, pour sa part, peine à retrouver son rythme d’avant la pandémie, affaibli par l’inflation et les disparités persistantes de revenus. Malgré les efforts en faveur de la réalisation de la parité entre l’investissement public et privé d’ici 2026, attirer davantage d’initiatives privées et favoriser l’entrepreneuriat reste un défi considérable.

Parallèlement, l’accès au financement constitue un obstacle majeur pour les startups et les PME, amplifié par le manque d’éducation financière, les coûts élevés des options de financement disponibles et l’inadaptabilité aux besoins spécifiques de l’entreprise. Cette situation entrave le développement des petites entreprises et nuit à leur efficacité en termes de contribution à la croissance économique.

Le déficit hydrique causé par un changement climatique problématique met en évidence la vulnérabilité persistante du Maroc à sa dépendance au secteur agricole. Ainsi, pour renforcer la résilience économique face aux chocs climatiques, il est impératif d’accélérer les efforts de diversification de l’économie et d’investir de plus en plus dans des solutions durables. Au niveau du système financier, le changement climatique n’est certes pas un risque systémique, mais les agriculteurs des domaines agricoles affectés pourrait entraîner une pression accrue sur les institutions financières qui leur ont accordé des prêts, impactant ainsi le système financier en entier.

De plus, les fluctuations des prix du pétrole, exacerbées par les conflits régionaux, augmentent le risque d’investissement dans divers secteurs industriels et entraînent une incertitude accrue pour les investisseurs. Cette instabilité des prix du pétrole perturbe la chaîne de production, entraînant des hausses de coûts et des pressions sur les prix des produits. Il est donc essentiel pour le gouvernement de prendre des mesures pour maintenir la stabilité des prix et assurer la pérennité de l’économie dans son ensemble.

Pourquoi le Capital-Investissement ?

En dépit de tous les défis susmentionnés qui entravent la croissance des économies, il existe des moyens stratégiques pour accompagner rationnellement le développement, notamment à travers la promotion de l’investissement. Ainsi, la stimulation du Capital-Investissement dans ce contexte de croissance ne peut pas être vue comme une décision aléatoire dissociée, mais plutôt comme un tournant délibéré pour soutenir le potentiel des économies en croissance.

Le Capital-Investissement, également appelé « Private Equity » en anglais, désigne une pratique financière où des fonds d’investissement, gérés par des sociétés de Capital-Investissement, investissent des capitaux pour le compte d’investisseurs institutionnels et accrédités.

Ces fonds acquièrent et gèrent des entreprises à différentes phases de leur développement, avant de les revendre. Les entreprises investies ne sont pas cotées en bourse, donc à l’encontre de l’Offre Publique Initiale (IPO) qui permet à une entreprise de s’ouvrir au public, le Capital-Investissement réserve l’entreprise pour un cercle d’investisseurs plus exclusif et fermé, il s’agit ainsi plutôt d’une assemblée privée d’investisseurs qui non seulement injectent directement de l’argent dans l’entreprise, mais aussi s’impliquent dans la gestion et dans la prise de décisions importantes aux cotés des propriétaires initiaux. De plus, l’entreprise cible n’est pas toujours une société privée ; elle peut également être une entreprise publique qui vise à se privatiser et de se retirer du marché boursier.

Le cycle de vie d’un fonds de Capital-Investissement se déroule généralement en trois phases distinctes. La première est la phase d’investissement, qui va de la première à la quatrième ou cinquième année. Le fonds collecte des capitaux auprès d’investisseurs et se lance dans la recherche d’entreprises prometteuses. Il investit ensuite dans ces entreprises, les aidant à se développer et à atteindre leur plein potentiel. Ensuite, vient la phase de développement étalée de la troisième à la huitième année. Les entreprises soutenues par le fonds arrivent à maturité et commencent à générer des retours sur investissement. Les investisseurs reçoivent leurs premiers dividendes et le fonds peut envisager de nouvelles opportunités d’investissement. Durant la dernière période, la phase de liquidation, qui commence généralement à partir de la huitième année, le fonds arrive à la fin de son cycle de vie et procède à la cession de ses participations dans les entreprises. Les investisseurs récupèrent leur capital initial, majoré des plus-values générées. Le fonds est alors liquidé, mais son impact sur les entreprises et l’économie perdure.

Dans cette logique, la société de gestion définit à priori une durée d’investissement avant de revendre les parts à un autre investisseur ou de procéder à une introduction en bourse. L’objectif est de soutenir la vision de croissance de l’entreprise, de faciliter le processus de changement d’actionnaires, ou tout simplement de renforcer la gouvernance pour maximiser la valeur de l’entreprise, avant de se retirer des années plus tard.

Plusieurs analystes mettent l’accent sur l’importance de promouvoir le financement désintermédié. Le Capital-Investissement, en faisant partie, permet de fournir ainsi des fonds aux entreprises en dehors des circuits traditionnels de financement bancaire.

En général, cette option de financement a démontré un véritable effet positif sur le secteur financier de nombreux pays, et par conséquent sur leurs économies et leurs entreprises. L’approche d’investissement particulière dans ce type de financement s’explique en grande partie par la prise d’une participation active par les investisseurs dans la gestion de l’entreprise investie, ce qui permet de travailler sur l’amélioration des stratégies créatrices de valeur, de favoriser la croissance et de renforcer la performance financière de l’entreprise. Autrement, l’apport en numéraire s’accompagne évidemment d’un apport en industrie, qui est bien un apport de savoir-faire et d’expertise, ce qui contribue à améliorer la qualité des opérations et de la productivité et permet de réaliser des économies de coûts pour plus de compétitivité dans le marché.

Les Petites et Moyennes Entreprises (PME) ont effectivement besoin de ce stimulus pour évoluer. Pour ce type de société, le Capital-Investissement se présente comme un financement de créativité assistée qui leur ouvre de nouvelles perspectives pour innover dans leurs produits et services et de saisir les opportunités de croissance du marché, dans un milieu bien encadré et soutenu. En Europe, le nombre de PME financées a atteint les 17 800 entreprises, en 2023, soit 71% du total entreprises appuyées par des fonds d’investissement privés.

D’autre part, les sociétés de Capital-Investissement investissent dans les entreprises afin de les inciter à la croissance, laquelle entraine à son tour la création d’emplois. En 2020, une étude d’Invest Europe1 a révélé un chiffre de plus de 103 500 emplois créés en Europe par les entreprises détenues par les fonds de Capital-Investissement. Cela représente une augmentation nette de 2% lorsque le marché de l’emploi dans son ensemble s’est replié de 1,6%. En 2021, le soutien du Capital-Investissement a permis aux PME en Europe de créer de 116 800 emplois, soit une hausse de 6,9% qui dépasse la moyenne du continent (1,2%).

De même, le Luxembourg illustre la contribution de ce secteur à la création d’emplois, avec une part significative dans l’industrie des services financiers, représentant 15,7% des 51 000 employés. Le pays a réussi à devenir un pôle mondial du Capital-Investissement grâce à son environnement favorable aux affaires.

Lors d’une rencontre entre l’AMIC et la CGEM en février 2024, le Capital-Investissement a été présenté comme un véritable moteur de croissance pour les entreprises, en particulier les PME. Concrètement, les sociétés financées par le Private Equity et les investisseurs dans le secteur bénéficient de plusieurs avantages.

Ce type de financement repose sur le niveau d’intérêt et de confiance que les investisseurs portent aux activités de l’entreprise. En conséquence, ils fournissent un capital tout en s’impliquant dans les opérations de l’entreprise, mettant à disposition leurs compétences, leur expertise et leurs réseaux utiles pour favoriser la croissance de l’entreprise. De plus, il n’y a pas de limite quant au montant de capital que la société peut lever, offrant ainsi une flexibilité financière considérable au cours des périodes de développement de l’activité. Contrairement aux financements par emprunt auprès d’établissements de crédit traditionnels, le Private Equity n’impose pas de remboursements mensuels aux investisseurs. Cette absence d’obligation de remboursement permet aux entreprises de se concentrer pleinement sur leurs besoins et d’assurer une croissance continue et fiable.

Pour les investisseurs dans des fonds de Capital-Investissement, le secteur offre une multitude d’options pour déployer leur capital, en fonction de leurs objectifs, de leur tolérance au risque et de leurs ressources. L’investissement direct implique la prise de participation directe dans les sociétés non cotées. Cette approche permet un contrôle accru sur les investissements et la possibilité de générer des retours potentiellement plus élevés, mais exige une expertise approfondie du marché et dans la gestion. L’investissement via un fonds géré par une société de gestion, permet à l’investisseur de déléguer la sélection des entreprises cibles et la gestion à des professionnels expérimentés. Une option qui permet de diversifier les investissements et de limiter le temps consacré à la gestion active. Finalement, l’investissement à travers un fonds de fonds investit dans d’autres fonds d’investissement, pour une exposition indirecte à un large éventail d’entreprises et de stratégies. Ce mode d’investissement s’adresse aux investisseurs recherchant une diversification maximale et une expertise pointue dans la sélection de fonds.

Dans le Capital-Investissement, le gestionnaire institutionnel ne perçoit pas seulement une commission de gestion, mais également un pourcentage des bénéfices du fonds. Cela garantit que les intérêts du gestionnaire sont alignés sur ceux des investisseurs, à l’inverse de l’investissement dans les fonds publics, où le gestionnaire perçoit généralement une commission quelle que soit la performance du fonds, tandis que l’investisseur reste responsable des pertes éventuelles.

La diversification, une stratégie fortement recommandée par les experts en gestion de portefeuille, est essentielle pour réduire les risques d’investissement. Les fonds de Capital-Investissement offrent aux investisseurs cette possibilité d’accéder à des actifs faiblement corrélés entre eux et donc moins affectés par les mouvements des marchés renforçant ainsi l’effet attendu de la diversification pour assurer la stabilité.

En effet, les sociétés de Capital-Investissement axées sur la création de valeur sont souvent positionnées pour surpasser les gestionnaires d’actions publiques, surtout en période de turbulences du marché. Une étude de McKinsey a révélé que ces sociétés ont obtenu des résultats bien supérieurs à la moyenne du marché lors de la crise financière de 2008 et dans les années qui ont suivi, avec des gains atteignant 23%, soit 5 points de pourcentage de plus que ceux des fonds classiques. Ce succès s’explique par leur approche proactive de la création de valeur, qui consiste à identifier des entreprises prometteuses, à les aider à se développer et à les revendre au moment opportun. En période de crise, ces sociétés sont souvent en mesure de saisir des opportunités d’investissement à des prix attractifs, ce qui leur permet de générer des rendements supérieurs pour les apporteurs de capitaux.

Le Private Equity présente un potentiel considérable pour dynamiser l’économie marocaine. Cependant, son adoption par les entreprises et les investisseurs reste timide, en partie due à un niveau d’éducation financière insuffisant. En effet, une récente étude empirique publiée par l’IJAFAME2 (Ourahou, Y. et al., 2024), révèle que le niveau d’éducation financière au Maroc est au-dessous de la moyenne de l’OCDE établie à 62,70%. Cette lacune fait que le Capital-Investissement peut être perçu comme une option de financement peu familière, tant par les entreprises que par plusieurs investisseurs, malgré son potentiel significatif.

Private Equity au Maroc : Dynamiques et perspectives

Décryptage des avancées du Private Equity au Maroc.

L’émergence de l’industrie du Capital-Investissement au Maroc il y a une quinzaine d’années a prouvé son efficacité et son rôle important dans le paysage de l’intermédiation financière, notamment pour l’accompagnement des PME marocaines dans les secteurs secondaire et tertiaire en développement.

Depuis 2005, ce secteur jeune a observé une augmentation du nombre de sociétés de gestion, avec un rythme s’accélérant particulièrement en 2007, 2008 et 2010, avec 3 créations par an. Cette tendance confirme de l’attractivité croissante du secteur et de son potentiel de développement.

Jusqu’à fin 2010, les performances des fonds d’investissement témoignent de cette dynamique, avec un Taux de Rentabilité Interne (TRI) moyen s’élevant à 17% sur 33 sorties effectuées. D’un autre angle, l’impact positif du secteur sur les entreprises investies est également notable. En effet, l’étude réalisée par le CESEM3 a révélé que 95% des dirigeants interrogés étaient satisfaits de l’entrée des fonds d’investissement dans le capital de leurs sociétés. De plus, dans le cadre de la concrétisation de la politique de régionalisation avancée lancée en 2010, le Private Equity a adopté une stratégie d’investissement plus diversifiée. Les prises de participations se sont ainsi étendues aux régions du Sud, du Nord et de l’Oriental.

Dans le cadre réglementaire, la redéfinition de la catégorie des Petites et Moyennes Entreprises a conduit à la création des fonds OPCR (Organismes de Placement en Capital Risque) par les sociétés de gestion. L’objectif était de favoriser la transparence fiscale et attirer davantage d’investisseurs. En 2015, la loi n° 18-14 a été promulguée pour modifier la loi n° 41-05 relative aux Organismes de Placement en Capital-Risque, décrétée par le Dahir n° 1-06-13 du 15 moharrem 1427 (14 février 2006). Cette loi a permis la création des Organismes de Placement Collectif en Capital (OPCC), englobant tous les aspects et formes de ces organismes. Elle a également remplacé, dans l’article 8, les désignations et abréviations des Organismes de Placement en Capital-Risque (OPCR), des Sociétés de Capital-Risque (SCR) et des Fonds Communs de Placement à Risque (FCPR), respectivement par Organismes de Placement Collectifs en Capital (OPCC), Sociétés de Placement Collectif en Capital (SPCC) et Fonds de Placement Collectif en Capital (FPCC) dans la loi n° 41-05, ainsi que dans tous les textes législatifs et réglementaires en vigueur.

L’OPCC est un fonds d’investissement dont l’objectif est le financement principalement de PME marocaines non cotées. Ce financement se réalise par l’acquisition de titres de capital, de titres de créances et par l’octroi d’avances en compte courant d’associés, gérés par une société de gestion et détenus collectivement par des investisseurs, sous forme de parts ou d’actions.

La résilience du secteur du Capital-Investissement au Maroc, notamment le Capital-Risque, a été notable malgré l’impact de la crise sanitaire mondiale, en 2020, sous la supervision perpétuelle de l’AMIC. En effet, l’activité a enregistré une croissance de 1% en 2020, suivie d’une performance record en 2021. Cette dernière s’explique en partie, d’après Tariq Haddi, président honoraire de l’AMIC, par la consolidation de la loi n° 41-05 par la loi n° 58-22, qui a permis d’améliorer les dispositifs de conformité, de système d’information et de contrôle interne.

Effectivement, en 2021, 12 sociétés de gestion ont réalisé des investissements d’un montant total de 1,15 MMDH réparti entre 22 nouvelles prises de participation et 8 réinvestissements. En 2022, le Private Equity a enregistré une performance importante avec un TRI moyen brut pondéré qui s’est établi à 11% pour une durée moyenne d’investissement de 6 ans. Cependant le volume des investissements a connu un recul en 2022. Un total de 914 MDH a été investi par 11 sociétés de gestion, cette fois ciblant 27 nouveaux investissements sur 45 réalisés au total.

Cependant, il convient de noter que le secteur du Capital- Risque, partie intégrante du Capital-Investissement, a pris une importance croissante dans le paysage financier marocain. En effet, l’année 2023 a marqué un tournant décisif pour cette forme d’investissement en capital au Maroc, avec une croissance intéressante des investissements. Les montants investis ont presque triplé pour atteindre 81 millions de dollars, selon le rapport « MENA Venture Investment Summary 2023 » de Magnitt, une plateforme de référence en matière d’analyse des données sur le Capital-Risque dans le monde. Cette performance remarquable a placé le Maroc à la 4e place de la région MENA en termes d’investissements en Capital-Risque.

Cela a bénéficié principalement aux startups opérant dans des secteurs de la fintech, le e-commerce, la santé, les technologies éducatives et les solutions informatiques. Une affluence d’investissements qui traduit un regain d’intérêt croissant pour le potentiel entrepreneurial marocain et confirme le rôle important que joue cette forme de Capital-Investissement dans le financement et le développement des startups innovantes.

Ce rôle est reconnu par les principaux acteurs du secteur, notamment le directeur général du Fonds Mohammed VI pour l’Investissement, qui a encouragé activement cette dynamique, lors de la récente conférence sur le Capital-Investissement organisée par la CGEM et l’AMIC à Casablanca en février 2024.

Au Maroc, l’essor du Capital-Investissement ces dernières années s’inscrit dans une dynamique favorisée par un certain nombre de facteurs principaux. En tant que pays en développement, le Maroc exprime une volonté d’encourager l’entrepreneuriat dans l’objectif d’intégrer le secteur informel, qui représente une part importante de l’économie du pays et abrite de nombreuses compétences à la recherche d’accompagnement et de conseil. A ce titre, le Maroc reconnait la nécessité de diversifier les sources de financement offertes aux entreprises et de sensibiliser les porteurs de projets à l’existence d’alternatives aux sources traditionnelles. Le Capital-Investissement, sous toutes ses formes et avec ses diverses caractéristiques, s’avère un outil prometteur pour combler ce manque, permettant de soutenir les entreprises à fort potentiel, à tous les stades de leur développement.

La croissance du Capital-Investissement au Maroc peut être aussi attribuée à l’évolution et à la détermination des acteurs clés dans le domaine pour en faire un levier fondamental de l’économie marocaine. Au cours des dernières années, le pays a été témoin d’une augmentation substantielle du nombre de sociétés de Capital-Investissement, le dernier recensement faisant état de 33 sociétés de gestion à fin 2022. Entre 2017 et 2022, les fonds d’investissement créés ont levé un montant global de 8,18 MMDH, répartis entre fonds marocains et transrégionaux. L’année 2021 a particulièrement enregistré un record, avec plus de 1,8 milliard de dirhams levés. Ces fonds ont contribué à stimuler l’investissement, l’innovation et le développement économique dans divers secteurs.

De plus, le regroupement des sociétés de gestion dans l’Association Marocaine de Capital-Investissement (AMIC), étant la seule association reconnue par l’Autorité Marocaine du Marché des Capitaux (AMMC), fournit depuis 2000 un cadre solide pour la collaboration et la normalisation. En devenant membres de l’AMIC, ces entreprises ont bénéficié d’un partage de connaissances, des meilleures pratiques et d’une voix unifiée pour plaider en faveur d’environnements réglementaires favorable ainsi que pour une meilleure attractivité auprès des investisseurs.

Le paysage du Private Equity au Maroc a été marqué par une série d’événements significatifs qui ont contribué à la promotion et à l’expansion de cette industrie. La conférence annuelle du Capital-Investissement, organisée par l’AMIC, a tenu sa dixième édition le 31 mai 2023. Ce rassemblement a réuni des investisseurs, des chefs d’entreprises et des professionnels du secteur financier pour discuter des tendances actuelles de l’industrie du Capital-Investissement au Maroc, et pour échanger sur les meilleures stratégies, les opportunités et les défis de croissance, en vue de renforcer le rôle de cette option prometteuse de financement dans le rayonnement économique du Royaume.

La participation de l’AMIC au Women’s Private Equity Europe Summit, tenu du 20 au 22 septembre 2023, a été un autre moment phare pour l’industrie marocaine du Private Equity. Le sommet a mis en avant le potentiel de la femme dans le secteur, favorisant des opportunités de mise en relation, de facilitation des négociations et de renforcement des compétences.

En 2024, deux événements majeurs ont contribué à accentuer la résolution des acteurs du secteur à ancrer la valeur de ce financement dans le développement des entreprises marocaines. En effet, le 7 février, la conférence du Capital-Investissement organisée par l’AMIC et la CGEM a mis en lumière le rôle du Capital-Investissement comme moteur de croissance, particulièrement pour les PME. L’intervention de Mohamed Benchaaboun a été ainsi marquante, partageant la vision stratégique du Fonds Mohammed VI pour l’Investissement et les initiatives en cours. De son coté, Chakib Alj, président de la CGEM, a souligné l’ampleur réelle du Capital-Investissement, qui dépasse le simple apport du soutien financier aux entreprises cibles. Il a ainsi rappelé l’importance de ce secteur dans la promotion de l’investissement privé, désormais une priorité nationale, ainsi que dans l’accompagnement de la mise en place du dispositif spécifique à la TPME dans le cadre de la nouvelle charte de l’investissement.

Récemment, la 7ème édition des Morocco Capital Markets Days, tenus les 9 et 10 mai 2024 à Londres, a été marquée par une forte participation des acteurs marocains du Private Equity. Cet événement, reconnu comme le rendez-vous incontournable des marchés des capitaux, a réuni des figures clés de l’économie marocaine et des investisseurs internationaux, renforçant ainsi les partenariats et la contribution du Private Equity à la consolidation du système financier marocain.

Ainsi, l’évolution du secteur du Private Equity au Maroc témoigne d’une croissance significative, soutenue par des facteurs liés à la mobilisation des différents acteurs de l’économie marocaine. Ces avancées prometteuses ouvrent de nouvelles perspectives pour le développement économique et la diversification des entreprises marocaines.

Éclairages sur l’avenir du secteur au Maroc.

En tenant compte des tendances actuelles, des politiques gouvernementales, des priorités nationales et des avancées technologiques, un regard prospectif des efforts fournis pour pérenniser et développer le secteur, ainsi que des défis à surmonter pour atteindre ces objectifs, est essentiel pour comprendre les orientations futures menant à une croissance robuste et soutenue.

Lors de l’ouverture de la 10ème conférence annuelle de l’AMIC, Nezha Hayat, présidente de l’AMMC a souligné l’importance du rôle que joue le Capital-Investissement dans le soutien aux projets ambitieux, l’exploration de nouveaux marchés et la stimulation de l’innovation. Pour cela, elle a affirmé que le développement de ce secteur est une priorité stratégique pour l’Autorité. Dans cette optique, l’AMMC a annoncé qu’elle mettra à profit ses ressources doctrinales pour établir les bonnes pratiques en matière de services du Capital-Investissement. Une première étape sera la publication d’un guide thématique sur l’intégration des critères ESG dans la gestion des OPCC. Cette démarche s’inscrit dans le rôle fondamental de l’AMMC pour promouvoir la conformité, la transparence et la bonne gouvernance sur les marchés des capitaux.

La création du Fonds Mohammed VI pour l’Investissement traduit un engagement national à dynamiser le secteur du Private Equity. Initialement préconisé par Sa Majesté le Roi Mohammed VI en 2020, ce fonds stratégique a été instauré pour faciliter la mise en œuvre du plan de relance économique post-Covid. A ce jour, le schéma de contribution de ce fonds souverain se présente comme suit : lancement d’un appel à manifestation le le Fonds Mohammed VI pour l’Investissement a lancé un appel à manifestation d’intérêt pour la sélection de sociétés de gestion de fonds sectoriels et thématiques visant à catalyser l’investissement, accélérer la croissance et stimuler la création d’emploi. Lors du conseil d’administration et du comité de stratégie d’investissement du fonds, une première liste de 17 sociétés de gestion opérant dans divers secteurs prioritaires du Royaume a été dévoilée. La taille cumulée des fonds sélectionnés est estimée à 20 MMDH, avec le Fonds Mohammed VI pour l’Investissement dédiant une enveloppe globale de 6 MMDH, représentant jusqu’à 33% de la taille de chaque fonds. L’objectif est de renforcer la portée des investissements. Par conséquent, le fonds apportera un soutien efficace au développement du secteur du Capital-Investissement, avec une orientation particulière pour appuyer les petites et moyennes entreprises.

A la lumière des projections futures, le potentiel du Capital- Investissement au Maroc est considérable. Néanmoins, le secteur anticipe un l’effet stimulateur attendu de l’initiative du Fonds Mohammed VI pour l’Investissement, ce qui, selon plusieurs investisseurs, entraînera une expansion de la taille du secteur. Les analystes économiques et financiers espèrent un doublement, ou un triplement même, de la capacité d’investissement des sociétés de gestion, passant ainsi de 1-2 MMDH à 2-3 MMDH. Cela signifie que le nombre d’entreprises cibles augmentera, bénéficiant de montants intéressants en fonds propres intégrés dans leur passif. La prise de décisions stratégiques permettra l’essor de ces entreprises et de leurs activités. Les banques seront donc de plus en plus encouragées à prêter. A long-terme, à la fin de la période d’investissement, plusieurs des entreprises investies seront introduites en bourse, ce qui favorisera le système financier.

Fort de ces perspectives attrayantes, il est important de ne pas négliger les défis potentiels susceptibles de freiner la concrétisation de cette vision.

Le premier défi est de renforcer l’attrait des investisseurs pour le secteur du Capital-Investissement, dans un contexte qui nécessite encore des efforts. Bien que la lutte contre l’inflation par des politiques monétaires restrictives soit nécessaire, elle engendre des répercussions importantes sur l’économie à court terme. Ces mesures contraignent en effet les agents économiques à s’adapter à une période de transition marquée par des ajustements et des déséquilibres parfois difficiles à surmonter.

Les investisseurs sont également devenus plus exigeants quand il s’agit de la sécurité juridique. En réalité, le Royaume continue de se heurter à des obstacles dans certaines régions, tels que la lenteur des réformes, la mauvaise application des dispositifs légaux, la mauvaise interprétation législative et la difficulté d’application des traités internationaux sur la protection des investissements. Bien que cela ne compromette pas les efforts déjà déployés, cela réoriente l’attention sur des aspects plus sensibles afin d’assurer l’établissement d’un environnement juridique plus efficace et fiable pour les investisseurs.

Outre la création d’un environnement favorable à l’investissement, le Maroc doit aussi faire face au niveau d’éducation financière très faible, ainsi qu’au problème d’accès à l’information. En effet, un investisseur éclairé recherche avant tout la transparence et la clarté quant à l’utilisation de ses fonds et aux rendements attendus. Dès lors, l’incompréhension des mécanismes de structuration des fonds de Private Equity, en plus des performances qui ne sont pas à la hauteur des attentes, peut dissuader les investisseurs de s’engager dans cette option d’investissement. Cela peut ainsi limiter les flux de capitaux vers le secteur et entraver son développement. Du coté des sociétés de gestion, l’accès à l’information sur les entreprises cibles reste crucial pour leur permettre de réaliser la due diligence nécessaire avant d’engager les capitaux. Les capital-investisseurs s’appuient généralement sur les résultats d’un rapport de due diligence bien solide ainsi que sur les données du marché extraites de sources d’informations fiables.

Sous un autre aspect, il est nécessaire de promouvoir l’investissement en renforçant les entreprises en sous- capitalisation chronique, qui est dû à une méconnaissance des financements disponibles outre les sources traditionnelles. De ce fait, le président du Fonds Mohammed VI pour l’Investissement a déjà annoncé l’introduction d’un produit de financement des quasi-fonds propres en vue de permettre à ces entreprises n’ayant pas suffisamment de capitaux propres pour financer leurs opérations et leur croissance d’accéder au Capital- Investissement. Cet instrument est doté d’une enveloppe de 4 MMDH pour soutenir les projets d’investissement conjointement aux financements bancaires.

En ligne avec les perspectives de croissance du Capital- Investissement, le fonds de Private Equity d’Atlas Capital met en œuvre une stratégie d’investissement rigoureuse et diversifiée.

Conclusion

Le Maroc a défini une stratégie claire pour moderniser son économie et ses performances. Si des progrès ont été réalisés, comme en témoignent l’amélioration du déficit commercial et la baisse de l’inflation, la croissance économique reste fragile, notamment en raison de la faiblesse de l’investissement privé. Dans ce contexte, le Capital-Investissement apparait comme un levier stratégique essentiel pour stimuler la croissance et le développement à long-terme.

Le Capital-Investissement, étant non seulement une source importante de financement alternatif, mais aussi un moteur d’innovation et de développement, offre de nombreux avantages pour l’économie marocaine. Le secteur permet de favoriser la création d’emplois, et d’améliorer la qualité des opérations et de la productivité des entreprises. De plus, les investisseurs apportent une expertise précieuse pour la création de valeur et en contrepartie, cet investissement génère des rendements à long-terme stables et peu corrélés aux autres classes d’actifs.

Le développement du secteur du Capital-Investissement au Maroc est déjà en cours. En revanche, pour renforcer son rôle dans l’économie marocaine, il est nécessaire de relever certains défis pour en maximiser le potentiel. Ces défis incluent la création d’un environnement d’investissement attrayant pour les investisseurs, le faible niveau d’éducation financière et les problèmes d’accès à l’information. L’objectif est de permettre aux sociétés de gestions et aux investisseurs de prendre des décisions éclairées.

Dans cette perspective, plusieurs recommandations peuvent être envisagées. En effet, il est crucial de multiplier les événements et les conférences dédiés au Private Equity. L’organisation régulière de tels événements permettra d’accroître la visibilité du secteur du Capital-Investissement en sensibilisant les acteurs économiques à ses avantages et à ses opportunités pour attirer ainsi davantage d’investisseurs et d’entrepreneurs, particulièrement au niveau national. Également, la création de plateformes dynamiques et actualisées est essentielle. Ces plateformes en ligne devraient présenter des ressources de due diligence fiables et adaptées, nécessaires pour les investisseurs. Elles devraient inclure des outils d’analyse, des études de cas et des actualités sectorielles, tout en facilitant la mise en relation entre les sociétés de gestion et les entreprises cibles grâce à la mise à disposition d’annuaires professionnels. En outre, le développement du Private Equity au Maroc peut être soutenu par l’encouragement du partage de connaissances et d’expériences, que cela soit par le biais de publications d’articles ou des rapports institutionnels. Aussi, l’organisation de concours et de prix pour récompenser les entreprises les plus performantes financées par le Capital-Investissement peut être un moyen efficace de mettre en lumière les réussites du secteur et d’inspirer d’autres entreprises à explorer ce financement.

Ainsi, en plaçant le Capital-Investissement au cœur de sa croissance, le Maroc peut faire de ce secteur un catalyseur puissant de son économie contribuant ainsi à créer de la valeur durable pour l’ensemble du pays.

Published On: juin 2024
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