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Évaluation des stratégies d’investissement pour la Coupe du Monde 2030

Published On: octobre 2024
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Introduction

En 2030, la 24e édition de la Coupe du Monde de football masculin, organisée par la FIFA, se tiendra en Espagne, au Maroc et au Portugal. Cet événement sportif d’envergure mondiale rassemblera les 48 meilleures équipes du monde pour un total de 104 rencontres. Marquant le centenaire de la première édition, les matchs inauguraux se dérouleront en Argentine, au Paraguay et en Uruguay. Ainsi, en ajoutant ces pays d’Amérique du Sud aux hôtes européens et africain, l’événement soulignera véritablement son caractère international.

Accueillir un tel événement sportif nourrit l’espoir des effets économiques et sociaux considérables pour le pays hôte, tant directs qu’indirects, qui soutiennent ou stimulent la croissance nationale.

Directement, la Coupe du Monde attire des dépenses significatives, aussi bien des parties prenantes et des investisseurs nationaux et internationaux. La construction d’infrastructures, l’hébergement des visiteurs génèrent des opportunités d’affaires notables, ce qui injecte des fonds importants dans l’économie. Indirectement, les entreprises fournissant des biens et services, notamment dans les secteurs de la restauration et le transport, profitent de l’afflux de spectateurs, de participants et des organisateurs, et donc dépensent de plus en plus pour subvenir à la demande croissante. De manière induite, les salaires supplémentaires et la hausse des revenus pour les travailleurs impliqués dans l’organisation de l’événement entraînent ensuite une augmentation de la consommation et de l’épargne, dynamisant ainsi l’économie locale.

Atlas Capital a émis en octobre 2023 une Note Recherche intitulée : « Mondial 2023, Quel impact sur l’économie et le marché boursier ? »

Cette Note de Recherche est téléchargeable sur le site d’Atlas Capital en suivant le lien ci-après : https://atlascapital.ma/actualites/

Au-delà des retombées économiques, M. Albares, Ministre espagnol des affaires étrangères, de l’Union européenne et de la coopération, entrevoit dans l’organisation de la Coupe du Monde conjointement avec les voisins portugais et marocains, une opportunité unique d’établir un pont au rapprochement des pays et des civilisations, tout en promouvant les valeurs fondamentales du sport qui incluent la tolérance et le respect de la diversité.

Dans le cadre de cette analyse, nous définirons la stratégie d’investissement d’un pays hôte de la Coupe du Monde comme étant la décision délibérée et stratégique concernant l’allocation des ressources financières pour l’événement, pour assurer la mise à niveau des infrastructures et des services nécessaires à son bon déroulement. Cette stratégie varie entre la mobilisation des financements substantiels pour répondre à toutes les exigences aux normes internationales, ou l’adoption d’une approche financièrement prudente en améliorant les infrastructures existantes sans engager des fonds colossaux, ou encore la prise de décision de ne pas investir pour l’événement. L’évaluation de ces stratégies permettra ainsi d’identifier et d’analyser les opportunités et défis potentiels auxquels les pays organisateurs pourraient faire face, en tenant compte des facteurs et des aspects spécifiques à chaque pays.

Ambitions financières du Maroc : une stratégie audacieuse (+ 4.6 Milliards d’euros)

Des financements colossaux pour un défi de taille

En préparation à la Coupe du Monde 2030, et ayant pour échéance d’inspection 2026, la Fédération royale marocaine de football, sous la présidence de Fouzi Lekjaa, met en place un programme d’investissement important pour que le Maroc soit prêt à relever le défi de 2030.

Un budget prévisionnel de plus de 50 milliards de dirhams a été alloué à la mise à niveau des infrastructures sportives et hôtelières du pays, afin de répondre aux exigences du cahier des charges établi par la FIFA ainsi que d’offrir une expérience inoubliable aux visiteurs. Cela comprend la construction de nouveaux stades et centres d’entraînement, la rénovation des installations existantes, l’amélioration des services de transport et le développement des capacités d’accueil hôtelières. Compte tenu de l’importance des investissements requis pour accueillir cette cérémonie sportive, le Maroc adopte une stratégie de financement audacieuse et diversifiée en vue de garantir le succès de l’événement et de maximiser les retombées économiques et sociales pour le Royaume.

Les ressources allouées à ce projet ont été réparties de manière stratégique en fonction des différentes options de financement disponibles. Le Trésor Public s’engage à sécuriser 25 milliards de dirhams, destinés aux projets de construction des stades et centres d’entrainement. De plus, le Maroc sollicitera des crédits bancaires et/ou des emprunts sur le marché de la dette privée à hauteur de 17 milliards de dirhams ; ici les SEGMA (Services de l’État Gérés de Manière Autonome) joueront un rôle crucial dans la concrétisation des projets relatifs à l’infrastructure et au réseau de transport. Pour enfin financer les autres coûts liés à l’organisation, le Maroc compte sur l’appui international pour se procurer une dizaine de milliards de dirhams notamment sous forme de prêts concessionnels extérieurs et des dons d’autres pays amis.

De plus, la présidente de l’Autorité marocaine du marché des capitaux, Nezha Hayat, a annoncé que le Maroc a un autre plan de financement pour les projets de développement et d’infrastructures stratégiques qui consiste en la négociation de produits dérivés afin de développer les marchés de capitaux dans ce contexte sportif. Ceci comprend le marché des produits dérivés, ainsi que d’autres instruments financiers tels que les fonds négociés en bourse (ETF), les fonds communs de placement libellés en devises étrangères et les fonds communs de placement conformes à la charia.

Un pari gagnant pour le développement marocain

Au-delà de l’effervescence sportive et de la portée médiatique mondiale, les investissements alloués pour l’accueil d’une édition mémorable de la Coupe du Monde de Football génèrent une multitude d’impacts économiques et sociétaux durables ; l’amélioration des infrastructures et l’essor du tourisme en sont souvent la première image qui vient à l’esprit, mais le portefeuille diversifié marocain de sources de financement offre bien plus de retombées à considérer. Conscient de la nécessité d’investir dans des infrastructures amortissables, le Maroc se dirige vers l’allocation des ressources pour divers projets incluant non seulement des infrastructures sportives, mais aussi des projets de réhabilitation du réseau de transport (routier, ferroviaire, maritime et aérien).

En effet, la construction et la rénovation de stades modernes dans différentes villes du Royaume, dont le Grand Stade de Casablanca d’une capacité de 93 000 places, constitue un atout majeur pour le Maroc en matière de développement des infrastructures sportives marocaines de classe mondiale. Cela renforce ainsi l’attractivité du pays pour l’organisation d’événements sportifs de premier plan et permet d’offrir aux jeunes Marocains des installations de qualité pour favoriser la dynamique de développement du sport au Maroc.

En parallèle, les investissements dans les infrastructures de transport urbain auront un impact significatif sur la fluidification de la mobilité au sein des métropoles et la connectivité des villes marocaines. Par exemple, l’extension des lignes de tramway à Casablanca et Rabat permettra de desservir efficacement de nouveaux quartiers, réduisant ainsi la congestion routière et améliorant la qualité de vie des habitants. De plus, la modernisation des gares ferroviaires telles que Casa-Port et Rabat-Agdal augmentera leur capacité à accueillir un nombre croissant de passagers, facilitant ainsi les déplacements interurbains et nationaux. L’amélioration des routes, comme l’élargissement de l’autoroute reliant Casablanca à Marrakech, favorisera la fluidité du trafic et renforcera les connexions logistiques essentielles pour le développement économique du pays sur le long terme. Les investissements dans le développement du transport aérien, tels que l’extension de l’aéroport Agadir Al Massira, qui portera sa capacité d’accueil à 4,4 millions de passagers par an, soutient l’objectif national d’élargir le tourisme dans le sud du Royaume et de promouvoir la culture amazighe du Maroc. Concernant les services de transport maritime, le Maroc pourra réactiver plusieurs projets de liaisons à destination de ses co-organisateurs ibériques. La réouverture de la ligne Tanger-Portimão, reliant le Maroc au Portugal, permettra notamment de transporter jusqu’à 48 000 personnes par semaine. Aussi, la réactivation du modèle des 17 ferries (2011), au départ de Tanger, Al Hoceima, Nador, desservant Tarifa, Algésiras, Almeria, Barcelone, Sète, Gênes permettra de satisfaire la demande sur les lignes à destination de l’Espagne.

En effet, l’introduction d’un marché des produits dérivés, prévue d’ici fin 2024, constitue une étape importante dans la modernisation du marché financier marocain. Elle permettra d’élargir la participation au marché, en attirant non seulement les investisseurs institutionnels traditionnels, mais également les investisseurs individuels. Cela permettra de mobiliser davantage de capitaux nationaux et d’encourager une plus grande implication de la population marocaine dans le développement économique du pays. Ces instruments financiers permettent une meilleure allocation des risques, facilitent les flux de capitaux transfrontaliers et offrent aux investisseurs une plus grande variété de produits pour diversifier leurs portefeuilles. Dès lors, outre leur rôle recherché dans le financement de la Coupe du Monde 2030, les produits dérivés joueront un rôle essentiel dans le développement d’un marché des capitaux marocain plus efficace et plus profond, contribuant ainsi à une croissance économique durable et inclusive pour le Maroc.

Dans cette perspective de croissance, l’organisation de la Coupe du Monde est un événement majeur qui devrait stimuler considérablement le PIB marocain. En effet, les projections anticipent une augmentation de 1 à 2,5 points qui s’accompagnera d’une création de 130 000 à 160 000 emplois. Cette dynamique profitera à divers secteurs d’activité, dont l’hôtellerie et la restauration, la construction, le transport, et l’électricité. Effectivement, le secteur de l’hôtellerie et de la restauration aura besoin de recruter plus de personnel pour répondre à la demande croissante en hébergement, restauration et autres services d’hospitalité. Le secteur du BTP devrait offrir des opportunités d’emploi aux ouvriers, aux ingénieurs et aux architectes avec la nécessité de construire ou de rénover plusieurs installations. Également, en vue de s’adapter à l’augmentation anticipée du nombre de visiteurs, le secteur du transport créera des emplois notamment dans les compagnies aériennes, les ports et les entreprises de transport public. Pour le secteur de l’électricité, il convient d’envisager la création de nouvelles centrales électriques, l’équipement des installations par systèmes électriques de pointe qui favorisera la génération de postes de techniciens, d’ingénieurs en électricité et en réseaux.

La stratégie d’investissement adoptée par le Maroc pour la Coupe du Monde 2030, bien que perçue comme audacieuse, révèle un engagement profond envers l’accélération du développement du pays sur une période courte. Ce programme ambitieux vise à répondre aux besoins futurs de la société marocaine et des visiteurs du pays et témoigne d’un alignement stratégique avec la vision de croissance du Royaume, notamment en termes d’infrastructures, de développement économique et de modernisation financière.

Vision espagnole d’investissement : une stratégie moins contraignante (+1.4 Milliard d’euros)

Miser sur l’efficacité par un budget maitrisé

L’Espagne pour sa part, adopte une stratégie d’investissement moins contraignante, bien qu’elle serait l’organisateur principal du tournoi mondial de 2030, accueillant ainsi 10 matchs. Elle prévoit d’injecter 1,43 milliard d’euros pour l’événement, soit environ un tiers des investissements engagés par le Maroc et bien en deçà des dépenses du Qatar pour la 22e édition (200 milliards d’euros). Les dépenses d’investissement se répartissent en 750 millions pour l’amélioration des infrastructures et 683 millions pour les frais d’organisation, or l’Etat espagnol n’a pas encore dévoilé les sources de financement précises des projets d’investissement liés à l’accueil de l’événement.

Pourtant, pour un pays développé et diversifié comme l’Espagne, qui se classe parmi les 15 premières économies mondiales, mais tenant compte du déficit public qui persiste depuis 2008, il devra certainement envisager une approche de financement permettant de maintenir une gestion responsable des finances publiques. Pour les projets d’infrastructures et d’aménagement le gouvernement espagnol pourrait allouer une partie des fonds publics puisque, dans ce contexte, la Coupe du Monde peut servir de catalyseur pour des investissements qui auraient de toute façon été nécessaires et bénéfiques pour l’Espagne, bénéficiant ainsi à l’ensemble de la population espagnole sur le long terme. Cet événement de grande envergure peut être également le point de relance des partenariats public-privé (PPP) en Espagne, étant une bonne source de financement qui apporte non seulement la contribution financière mais aussi l’expertise des partenaires privés, notamment en matière d’engagement pour achever les travaux dans les délais impartis et éviter des coûts supplémentaires.

D’après un récent rapport de BME X (Bolsas y Mercados Españoles Exchange), les marchés de capitaux espagnols ont perdu de leur pertinence et compétitivité sur les plans européen et mondial. Pour soutenir la vision gouvernementale de réduction progressive de la dette publique, qui s’établit à 107,7 % du PIB en 2023, les institutions financières espagnoles peuvent considérer le fort potentiel dans le recours au financement par levée de fonds sur le marché des capitaux. L’objectif est de revitaliser ce marché grâce à de nouvelles réformes. En effet, le financement des projets d’infrastructure par les marchés de capitaux permettra à la fois d’accéder à des fonds substantiels et de soulager la dette publique nationale, améliorant ainsi la santé financière du pays sur deux fronts, les finances publiques et la liquidité du marché financier local.

Des bénéfices prévisionnels pour l’économie espagnole

D’une part, cette approche d’investissement liée à la Coupe du Monde 2030 répond à une vision pluridimensionnelle pour le gouvernement espagnol. Ce tournoi s’avère servir de stimulus pour améliorer plusieurs agrégats économiques et équipements publics, bénéficiant ainsi à l’ensemble de la population espagnole sur le long terme. En effet, la mise à niveau des infrastructures et la construction de nouvelles installations peuvent booster la richesse nationale, créer de l’emploi durable et dynamiser l’activité économique dans les secteurs du tourisme, de la construction et des services.

À titre d’illustration, les médias hispaniques font déjà état d’une projection de revenus importants, estimées à environ 10 milliards d’euros. Ces recettes se répartiraient entre un chiffre d’affaires de 5.12 milliards d’euros lié à l’événement et les revenus touristiques générés par l’afflux de visiteurs (plus de 4.5 milliards d’euros). Il est anticipé que les dépenses des supporters dans les stades, les centres d’entraînement et les infrastructures annexes devraient également stimuler l’économie espagnole. Les estimations prévoient des dépenses de plus de 5,5 milliards d’euros.

En termes de création d’emplois, certaines études indiquent qu’en Espagne, chaque million d’euros consacrée à l’investissement et l’organisation de la compétition génèrerait 78 emplois à temps plein. Au total, ce sont plus de 110 000 nouveaux emplois qui pourraient être créés sur le territoire espagnol.

A la lumière de la situation préoccupante du marché boursier espagnol, avec une chute de 67% du poids des actions cotées d’émetteurs espagnols dans les fonds et SICAV nationaux, entre 2005 et 2022, atteignant son plus bas niveau depuis le début du siècle, il est important de souligner que les investissements prévus pour l’accueil de la Coupe du Monde laissent entrevoir une relance prochaine.

La stratégie d’investissement adoptée par le gouvernement pourrait jouer le rôle du levier pour inverser la baisse marquée de l’intérêt des investisseurs pour les actions espagnoles. Le secteur boursier en Espagne pourrait projeter une hausse significative de la valeur des entreprises cotées, notamment celles impliquées dans les projets d’infrastructure, ce qui entraînera une augmentation de la capitalisation boursière du marché espagnol. Autrement dit, le marché des capitaux bénéficiera d’une meilleure visibilité, de signaux accrus de stabilité et d’une plus grande liquidité. Ces facteurs sont susceptibles d’attirer davantage d’investisseurs, tout en permettant aux entreprises espagnoles de figurer dans les indices boursiers les plus performants. Cela devrait renforcer, conséquemment, la présence du pays et augmentera sa compétitivité sur la scène internationale.

D’autre part, l’aspect économique et financier ne serait pas le seul à être valorisé. L’organisation d’un événement de ce type donne généralement un élan à la marque nationale et, par conséquent, aux marques régionales. Ainsi, le gouvernement espagnol s’apprête à tirer profit des valeurs sportives unificatrices pour rapprocher les citoyens des différentes régions du territoire et donc projeter une nouvelle image rayonnante aux yeux du monde.

Pour le pays connu pour le fameux Clásico (Derby entre le FC Barcelona et le Real Madrid), et le Derbi Madrileño (Derby de Madrid), et des stades véritablement iconiques qui résonnent d’histoire et de passion pour le football, attirant des supporters du monde entier, une telle stratégie d’investissement est légitimement justifiée. Elle s’inscrit plutôt dans une vision de modernisation et de mise à niveau des infrastructures existantes, afin de garantir le bon déroulement de cet événement sportif majeur, apportant des bénéfices significatifs tant pour Source : Comisión Nacional del Mercado de Valores (CNMV) et BME l’événement lui-même que pour le pays et sa population.

L’approche minimaliste du Portugal : une stratégie conservative

Les stades portugais sans nouveaux investissements

Le Portugal est bien le troisième pays qui accueillera en 2030 la 24e édition de la Coupe du Monde. Lors de la cérémonie de lancement du slogan officiel « YallaVamos 2030 », la Fédération Portugaise de Football (FPF) a fait une annonce importante : aucun investissement majeur n’est prévu pour les stades de Luz, Alvalade et Dragão, qui accueilleront des matchs de la Coupe du Monde 2030.

Le Stade de Luz, appartenant au club Sport Lisboa e Benfica, a été inauguré le 25 octobre 2003. Ce stade moderne est construit selon les techniques les plus innovantes et répond aux normes de sécurité les plus strictes de la FIFA et de l’UEFA. Il dispose de 65 000 places assises couvertes, 156 loges de luxe et deux écrans géants. Il est doté d’un anneau VIP avec plus de 7 000 sièges confortables. Une rénovation prochaine prévoit le remplacement de la pelouse après un concert musical tenu le 26 juin 2023.

Le stade José Alvalade, situé à Lisbonne, est un autre site clé pour le Mondial 2030. Etant classé comme stade 5 étoiles de l’UEFA, il dispose de 50 095 places, dont 50 sièges pour handicapés, 1 542 sièges Skybox, 1 968 sièges VIP et Business, et 100 sièges en tribune. Les places publiques se répartissent entre 24 261 au niveau A et 21 970 au niveau B, avec 204 sièges réservés à la presse. De plus, le stade offre 1 315 places de parking souterrain, dont 30 pour les spectateurs handicapés.

L’Estádio do Dragão à Porto, domicile du FC Porto depuis 2003, a une capacité de 50 033 places, ce qui en fait le troisième plus grand stade du Portugal. Inauguré le 16 novembre 2003, sa construction a coûté 125 millions d’euros. Ces installations modernes garantiront un cadre optimal pour les matchs de la Coupe du Monde 2030, sans nécessiter d’investissements majeurs supplémentaires, selon la fédération.

Par conséquent, chacun de ces stades répond aux critères de capacité minimale de 40 000 places, avec l’Estádio da Luz se distinguant par sa capacité maximale de 65 000 spectateurs, lui permettant potentiellement d’accueillir des matchs de phases avancées du tournoi. Cette approche minimaliste mais stratégiquement conservatrice, vise ainsi à maximiser l’utilisation des infrastructures existantes sans engager de nouveaux investissements majeurs. Dans cette optique, António Laranjo, chef du comité d’organisation de la candidature ibéro-marocaine, a déclaré : « Au Portugal, les investissements ne sont pas pris en compte, les stades que nous envisageons se sont avérés être dans les meilleures conditions pour accueillir les événements les plus importants. »

Néanmoins, bien que le Portugal ait choisi de ne pas investir massivement dans ses stades existants pour la Coupe du Monde 2030, il ne s’agit en aucun cas d’un manque d’ambition pour l’événement. En réalité, le Portugal a choisi de ne pas attribuer explicitement et systématiquement les futurs projets d’investissement à la Coupe du Monde. Ces derniers s’inscrivent plutôt dans une volonté de développement délibérée et pérenne, initiée par et pour le pays. L’objectif étant d’améliorer la qualité de vie des citoyens portugais et de stimuler les secteurs clés de l’économie portugaise sur le long terme.

En ce qui concerne le secteur touristique, l’autorité nationale du tourisme portugaise (Turismo de Portugal) a récemment signé un protocole avec 12 entités bancaires, permettant de revoir et de renforcer la ligne de soutien à la qualification de l’offre touristique, avec une enveloppe budgétaire de 300 millions d’euros. En effet, cette initiative prévoit une augmentation du plafond alloué pour chaque opération par Turismo de Portugal, de 1,5 à 3 millions d’euros, afin de garantir une plus grande capacité d’intervention, une discrimination positive des entreprises ayant obtenu la distinction Sustainability Leader dans PET 360º 1 et une inclusion des dépenses d’investissement relatives au logement des employés de l’entreprise. Grâce à cela, le Portugal pourrait moderniser durablement son offre touristique et renforcer sa compétitivité, tout en tenant compte des préoccupations environnementales croissantes des visiteurs.

Quant à la mise à niveau des infrastructures de transport, la proposition du Budget de l’Etat pour 2024 prévoit l’allocation de plus de 1.3 milliard d’euros dans les chemins de fer et l’expansion des réseaux de transport public, notamment la nouvelle ligne à grande vitesse Porto-Lisbonne et le système de mobilité Mondego auxquels un investissement de 717 millions d’euros est envisagé, soit 56 % de plus qu’en 2023. Ces projets visent à concrétiser les objectifs du Programme national d’investissement 2030 et sont également anticipés comme générant une création massive d’emplois.

Le choix audacieux du Portugal : une option gagnante pour le pays ?

La stratégie d’investissement mise en œuvre par le Portugal démontre une gestion responsable des finances publiques en privilégiant les besoins à long terme du pays. En analysant les chantiers d’investissements en cours et à venir, il apparaît que le Portugal opte pour une réallocation des ressources vers des secteurs prioritaires nécessitant un soutien accru de la part des pouvoirs publics. En effet, plutôt que d’engager des investissements exclusivement dédiés à la Coupe du Monde, le pays privilégie une approche prudente et modérée qui s’avère être légitimement soutenue par les atouts dont il dispose.

Le Portugal aspire à se présenter ainsi comme un hôte solide pour l’organisation de la Coupe de la FIFA, en capitalisant sur le patrimoine sportif de qualité existant, alliant histoire et authenticité ce qui permettra une réduction des coûts de construction et de minimiser l’impact environnemental et sociétal.

Dans cette perspective, par un déploiement avisé et stratégique de ses ressources, le Portugal s’engage à apporter le soutien nécessaire aux services prioritaires pour la réussite de l’accueil du Mondial, notamment les services de télécommunication, de transport et d’hospitalité. Par ailleurs, le pays se voit s’investir ces dernières années dans une volonté d’assurer une stabilité économique post-événement, se traduisant par la gestion rigoureuse du pourcentage de la dette publique qui est passé de 134.9% en 2020 à 112.4% en 2022 et 99% en 2023, selon la Banque du Portugal.

Le Portugal manifeste ainsi sa conviction d’être prêt pour le défi d’organiser la Coupe du Monde 2030 en collaboration avec le Maroc et l’Espagne, puisqu’il accueillera le nombre le plus restreint de matchs parmi les co-organisateurs. La FPF ainsi que la population portugaise nourrissent de grands espoirs quant à l’organisation d’une demi-finale à Lisbonne, du fait que la finale des 104 matchs ne s’y déroulera pas. De plus, Son Excellence Carlos Pereira Marques, l’Ambassadeur du Portugal au Royaume du Maroc, a souligné dans une récente interview avec l’Opinion, que le Portugal prévoit de prendre les mesures nécessaires au moment approprié, sans se précipiter.

Conclusion

Cette édition tripartite de la Coupe du Monde joue le rôle d’un catalyseur puissant pour les trois pays, dont les niveaux d’industrialisation diffèrent notablement. Cette divergence économique peut expliquer en grande partie les différentes stratégies d’investissement adoptées par chacun.

Le Maroc, ambitieux de réussir le défi d’accueillir une édition exceptionnelle de la compétition, consacre 4.6 milliards d’euros, provenant essentiellement du budget de l’Etat, des SEGMA et des prêts concessionnels extérieurs. De plus, il s’apprête à introduire un marché des produits dérivés pour soutenir le plan de financement initial dédié à ce contexte. Ces investissements témoignent de l’engagement du Royaume à accélérer son développement à l’horizon 2030, avec des améliorations prévues non seulement pour les installations sportives, mais aussi pour les secteurs du transport, de la finance, du BTP et du tourisme.

L’Espagne, de son coté, prévoit un investissement de plus de 1.4 milliard d’euros, réparti entre l’amélioration des infrastructures (750 millions d’euros) et les frais d’organisation (683 millions d’euros). Les sources de financement spécifiques n’ont pas été détaillées, mais compte tenu de la situation budgétaire du pays, il serait judicieux d’anticiper une diversification des sources entre le Trésor public, les partenariats public-privé et les marchés de capitaux. Cette approche permettrait de soulager les finances publiques et de dynamiser le marché boursier espagnol.

Le Portugal quant à lui, a annoncé l’adoption d’une approche minimaliste en matière d’investissements dans les infrastructures sportives dédiées à la compétition. Par cela, le pays privilégie le développement de ses secteurs prioritaires dans le cadre de son programme national d’investissement 2030, sans les lier directement à l’événement sportif, en capitalisant sur les atouts touristiques et infrastructurels existants du Portugal, en vue de limiter les coûts et de préserver la maîtrise de la dette publique.

Cette stratégie modérée s’avère légitime, tant que le pays s’aligne sur une feuille de route qui favorise le développement des secteurs étroitement impliqués dans l’organisation d’un événement d’une telle ampleur.

Au-delà de toutes ces stratégies d’investissement individuelles, cette organisation conjointe de la Coupe du Monde 2030 offre l’opportunité de renforcer la coopération entre les trois pays dans des domaines clés tels que le transport et la sécurité ainsi que dans d’autres secteurs connexes, notamment le digital et l’agroalimentaire. Des synergies transfrontalières verront prochainement le jour, grâce à ce tournoi, permettant ainsi de mutualiser les expertises et de maximiser les retombées économiques et sociales de l’événement pour l’ensemble des parties prenantes, manifestement sur les deux continents.

Published On: octobre 2024
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